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jeudi 3 décembre 2009

La pandémie de la peur: A h1n1

La pandémie de la peur: entretien avec Bernard Dugué

BDuguérecadre

Bernard Dugué est l'un des chroniqueurs les plus attentifs de la panique H1N1 en France. A l'occasion de la sortie de son livre
H1N1, la pandémie de la peur, nous lui avons soumis une petite "foire aux questions".



Pourquoi cet intérêt si aigu et si précoce pour la grippe A de 2009?
Tous les phénomènes sociaux m'intéressent et si la grippe H1N1 a suscité mon attention, c'est parce qu'elle m'a semblé tracer quelque chose d'assez inédit, une sorte de rupture, un fait de société sortant de l'ordinaire, contrastant avec le déroulement de la grippe saisonnière que l'on connaît chaque année sans qu'une telle couverture médiatique ne se déploie. 2009 est une année étrange.

A quel moment avez-vous eu le soupçon d'une dérive ?  
J'ai pressenti une sorte de « cabale » début mai. Je ne sais pas quels éléments ont été déterminants mais mon intuition rationnelle a capté très vite une distorsion entre la réalité de cette nouvelle épidémie grippale et la dramatisation médiatique qui s'en est suivi. Il y a eu deux vagues d'alarmes. Début mai, puis début juin lorsque les autorités ont évoqué une campagne nationale de vaccination. Tous les éléments livrés ensuite dans les médias pouvaient faire l'objet d'une critique et forger la thèse complémentaire d'un affolement de la machine sanitaire et médiatique. 
flupanic_exit_NS09
Panique grippale au festival EXIT, juillet 2009.
Photo SD


Quelles conclusions générales tirez-vous du déroulement de cette pandémie?
Les réflexions sociologiques et philosophiques sont arrivées au moment où je rédigeais les billets sur Agoravox. Je les ai réservées pour écrire ce livre sur la pandémie de la peur. La machine sanitaire s'était emballée, montrant les traits d'un activisme intempestif signé comme dévoilement de la machine technicienne et pragmatique: quand un plan est élaboré il faut s'en servir. La médecine industrielle est devenue une excroissance qui se développe pour partie indépendamment des nécessités rationnelles de la société. Quant au motif philosophique qui génère l'atmosphère propice au déroulement de cette mobilisation contre la grippe, il est aussi clair: peur, hypertrophie d'un système. En bref, c'est parce que le développement technique, technoscientifique et technocratique est abouti qu'il peut engendrer ces excroissances sanitaires sans commune mesure avec le danger réel d'un virus grippal. 

Comment les citoyens peuvent-ils se défendre face à cette peur ? 
Il n'y a qu'une seule possibilité: l'instruction, la raison. Le citoyen peut se protéger des vagues d'affolement s'il a atteint un seuil d'immunité rationnelle face à des diffusions intempestives d'informations anxiogènes. Nul ne peut savoir comment va réagir un individu mais une chose est sûre, si les gens ont les moyens d'accéder à une vision contrastée des choses, une vision qui n'est pas celle que veulent imposer les instances intéressées au profit et à la domination, eh bien ces gens vont se mettre à douter et finiront par se forger une opinion raisonnée des peurs diffusées par ceux qui ont peur eux-mêmes… ou qui ont intérêt à faire peur.

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